Mars 2018 : Jérôme COLIN nous livre,
chez Allary Éditions, son deuxième roman. La quatrième de couverture nous
annonce un sujet assez classique car traité de nombreuses fois :
l'adolescence, celle du fils aîné, en ce qui nous concerne, Paul, qui vient
mettre un peu de chaos dans une famille où les rouages semblaient bien huilés,
si l'on remonte 2 ans en arrière.
Ce roman est bien plus subtil que ce qu'il
nous laisse présager à la lecture du résumé (j'ai la fâcheuse manie de choisir
mes lectures en fonction de la quatrième et cela m'a joué plusieurs fois des
tours, j'en parlais précédemment sur ma chronique du roman de Gabriel TALLENT).
En effet, la crise d'adolescence ne sert que de révélateur, la famille ne part
absolument pas en vrille, il s'agit plutôt d'un père qui ne sait plus comment
réagir face aux attitudes – nouvelles – de son grand fiston, bien moins enclin,
depuis quelque temps, à accueillir son père dans son antre (sa chambre) ou à
lui claquer la bise en guise de démonstration affective. Et forcément, ce père
titubant, du haut de son piédestal de patriarche, risque bien de faire
dégringoler la tour familiale !
Ils sont quatre dans cette famille, ça fait
très cliché « famille idéale », où les parents ont eu ce que l'on
appelle « le choix du roi », un garçon puis une fille (Élise) qui
semble, pour quelques pages encore, épargnée par ce monstre qu'est la crise de
l'adolescence. La mère, pharmacienne, semble, dans un premier temps, assez
détachée de ce qu'il se passe. On comprendra qu'il s'agit pour elle de la seule
stratégie viable à mener lors de cette tempête hormonale qui semble épargner
bien peu de familles. Le père, investi d'une mission quasi divine, tiraillé par
ce que l'on doit dire et ce que l'on devrait dire, pris entre l'étau du père
protecteur et du père en lutte pour son fils mais aussi pour l'ado qu'il a
lui-même été (et qui semble avoir été lâché) perd pied en agissant consciemment
à l'inverse de ce qu'il souhaite faire.
Il y a la psy et son chemisier blanc, qui
fait presque partie de la famille si ce n'est que ses bons conseils sont
payants (et parfois un peu à l'emporte-pièce).
On subit quand même pas mal l'attitude de
Paul et on a aussi envie de lui en retourner une bonne (au placard notre bienveillance
éducative ponctuée de communication non violente) et on souffre pour ce père de
famille qui a l'impression de perdre son fils, sa femme, et à qui il ne reste
que sa fille qui accepte encore d'être choyée. On rigole aussi pas mal, surtout
avec l'évocation de la pièce centrale de la maison, les WC, sorte de cairn,
où le patriarche aime à se réfugier lorsqu'il est perdu (voire à dormir,
sisisi. Et pourquoi pas sur le canapé, me direz-vous ? Il faudra lire pour
comprendre pourquoi).
On appréciera (ou pas) le lien qui est fait
avec la douloureuse actualité de ces dernières années, les attentats, qui ont
été exploités par l'auteur afin d'être des moments non seulement chargés d'un
point de vue historique, mais aussi des moments clés pour la famille (l'attentat
de Paris le 13 novembre 2015 puis l'attentat du métro bruxellois, le 22 mars
2016).
C'est un roman qui se lit vite, il m'a fait
de l'oeil grâce à sa thématique qui soit passe, soit casse, et là, bien
entendu, ça passe ! Il est bien écrit et très agréable à lire, on ne
peut que se reconnaître dans chaque personnage de cette famille très comme les
autres. Ces sujets, triviaux, à l'échelle de chaque individu sont vécus comme
exceptionnels et pourtant quoi de plus banal que la routine d'un mariage vieux de
20 ans et la rébellion de nos chers boutonneux ? On ne s'en lasse
décidément pas car tout n'est pas blanc ou noir. Il y a des gros mots et de
l'insolence, tout pour plaire.
https://www.allary-editions.fr/
(Émilia Sancti)
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