Deuxième roman pour William BOYLE, édité
chez Gallmeister en 2017, « Tout est brisé », laisse présager,
à raison, que ça risque d'être un peu pessimiste, noir, voire carrément
dépressif. Néanmoins, Gravesend, son premier roman publié par
Rivages en 2016 ayant été salué par la critique, je ne pouvais laisser passer
ce titre !
Contrairement à ce que laisse présager la
quatrième de couverture, le roman se compose de deux voix : celle d'Erica,
la mère et celle de Jimmy, le fils. Le livre est découpé en 4 parties, et les
deux protagonistes prennent la parole tour à tour.
Le moins que l'on puisse dire c'est que ça
fleure pas la joie de vivre lorsque l'on ouvre le roman. On tombe de suite sur
le récit d'Erica, mère de Jimmy, le fils unique, qui s'est fait la malle sans
avoir terminé ses études, elle ne sait pas bien où, et qui refuse de lui donner
des nouvelles. Et ça dure depuis 2 ans, ambiance... Dans le même temps, Erica a
essuyé le décès de son mari (tumeur au cerveau), celui de sa mère, et doit
gérer son père, pas de très bonne humeur suite à son hospitalisation. Voire
carrément ingérable. Je vous renvoie au passage où il grommelle contre sa
couche. On pourrait croire qu'Erica serait aidée par sa sœur. Que nenni, cette
dernière se cache derrière la maladie de son mari (je crois qu'il y a un
problème de karma dans cette famille !)
Bien sûr, l'argent ne tombe pas du ciel
alors elle bosse, chiale devant ses collègues, n'a plus un rond (la santé n'est
pas gratuite, la mort non plus d'ailleurs). De prime abord on ne comprend pas
vraiment pourquoi Jimmy la joue perso, lui qui a été avisé des décès, n'est
même pas venu faire un tour.
Jimmy prendra la parole dans la deuxième
partie (la troisième partie sera pour Erica, etc) et l'on découvrira un jeune
homme désenchanté (le terme est faible), passablement alcoolisé et sans le sou,
vivant aux crochets de ses amants. Enfin, ça sent le roussi parce que justement
il vient de se faire larguer par son mec. De force, à contre-coeur et en marche
arrière, le voilà de retour chez sa mère et avec son grand-père (celui qui veut
décidément pas pisser dans sa couche). Retour à la chambre d'ado, aux posters
de Jeff Buckley et à ses CD's et à ses tourments, qu'il a essayé de fuir,
vainement, puisque son mal-être ne l'a finalement jamais quitté.
« Tout est brisé », c'est l'histoire d'un tout jeune adulte
qui est homosexuel et qui a été rejeté par son père, qui est en crise contre sa
mère d'avoir pu accepter cela et qui n'arrive pas à dépasser les mots qu'il a
reçu comme des gifles.
C'est l'histoire d'une mère qui a tout
perdu, son fils, son mari, son fric, sa vie et qui tente très maladroitement de
recoller les morceaux.
Une rencontre pour le moins étrange, une
énième fuite dans un bus solitaire vont peut-être aider ces deux malades de la
communication à renouer, sur la base de souvenirs communs, une complicité
mère-fils qui à défaut d'être présente, a existé un jour.
C'est pas la grosse poilade du siècle (au
cas où vous auriez encore un doute), mais le récit est servi par une écriture
noire sur fond de Leonard Cohen et de Bob Dylan. 204 pages à lire d'une traite,
avec un verre de pif à portée.
(Émilia Sancti)
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