dimanche 17 mars 2019

Florence CESTAC & Daniel PENNAC « Un amour exemplaire »


Florence CESTAC aux couleurs et Daniel PENNAC à la plume pour une histoire d’amour avec un énorme A. Ce destin, raconté ici en BD, est celui de Germaine et Jean, de leur rencontre à leur séparation par la mort du second et leurs retrouvailles sous la terre. Un couple atypique, original, un peu dans la tradition d’un Roméo & Juliette rural et jmenfoutiste, mais pas dans la déchirure, plutôt pour l’aspect couple qui s’est formé par miracle, familles dirons-nous de différente extraction sociale, certes toutes deux dans le vin, mais pas franchement pour les mêmes raisons. D’un côté la production, de l’autre le goulot à téter.

Germaine et Jean seront follement amoureux l’un de l’autre durant toute leur vie. Cependant ils prendront la décision de ne pas avoir d’enfants, de travailler le moins possible, de ne pas se gâcher en s’épuisant pour un salaire. Quelques passions : la vie, l’oisiveté et la lecture. On fait pire comme projet de carrière. Toute leur vie va être rythmée par les livres, ceux qu’on lit (directement stockés à la cave !) à ceux que l’on regarde simplement pour leur beauté (places de choix dans le salon), que l’on dorlote, les « collectors », les raretés.

Germaine et Jean, Daniel PENNAC les a connus, aimés, admirés, enviés sans doute dans ce sud de la France où le soleil est prétexte à la paresse. Ce couple de l’arrière-pays niçois semble une référence pour PENNAC. De PROUST aux « Thibault » en passant par « Don Quichotte », MONTAIGNE ou CÉLINE, c’est par la littérature que se joue tout le quotidien du couple.

Florence CESTAC (cofondatrice des Éditions Futuropolis) et sa patte spéciale pour les nez en patate montre Daniel enfant, avec le frangin Bernard (celui à qui il rendra hommage dans le livre « Mon frère » présenté en ces pages), eux aussi sorte de couple oisif, un brin flemmard, tous deux faisant connaissance avec Germaine et Jean. Les dessins semblent échappés de l’école franco-belge, très colorés. Et bien sûr comme Monsieur PENNAC est au scénario, on rigole comme des bossus, de tendresse souvent. On se gondole, d’autant que les hommages à PAGNOL sont certes disséminés mais franchement présents (la côte d’azur sans doute, l’odeur du pastis, la proximité des jeux de cartes, le farniente sous le soleil brûlant).

Cet « Amour exemplaire » est ensuite devenu une pièce de théâtre, et c’est l’adaptatrice Carla BAUER qui en parle en fin de volume, qui rappelle les poisses, les guignes de la tournée théâtrale. PENNAC y a joué, il aide toujours ses « enfants » d’une manière ou d’une autre. C’est grâce à cette adaptation que la BD de 2015 est aujourd’hui rééditée chez Dargaud (2018), le type même de BD qui apaise, qui rend heureux et bon, comme tout PENNAC en somme.


(Warren Bismuth)

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