vendredi 15 décembre 2017

Gisèle FOURNIER « Ruptures »


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Un Jean-Marie fuit la ville après un burn-out au travail et dans sa vie privée, et vient s’installer sur les collines d’un hameau lugubre près de la frontière italienne. Seulement voilà, arrivé sur place ça épie, ça secrète, ça cache, ça se tait. Ne rien voir. Ne rien entendre. Adrien le bistrotier cherche à faire parler Jean-Marie sous couvert d’une amitié naissante : qu’est-ce qu’il est venu foutre là ? Qu’est-ce qu’il cherche ? Le seul compagnon de Jean-Marie est Chalilas, un chat errant qu’il a adopté, d’ailleurs lequel a adopté l’autre ? Adrien lui est un natif du village, mais il a eu la mauvaise idée il y a longtemps de partir s’installer ailleurs. Quand il est revenu sur ses terres natales pour retrouver ses racines, il était trop tard, il était désormais considéré comme un étranger. Dans le village, des évènements mystérieux se déroulent, des trafics sans aucun doute. Mais l’omerta règne. Sur fond de ce refrain des « imbéciles heureux qui sont nés quelque part », le scandale de l’amiante. Omerta là aussi. Le boulot que Jean-Marie vient de plaquer consistait à accompagner les travailleurs touchés par la contamination à l’amiante. Là aussi, tout le monde savait, même si les pouvoirs publics le nient une fois que la toxicité du matériau est démontrée. Et puis il fallait du boulot. L’amiante interdite aurait entraîné du chômage, la fermeture des usines. Et surtout il y avait les lobbies, le poids invisible, de quoi baisser les bras et fermer les yeux. Là aussi. Dans un décor minimal et par des phrases tantôt longues tantôt très brèves, Gisèle FOURNIER plante un roman intimiste, efficace, avec ce rêve du retour à la terre qui s’avère rapidement un cauchemar, qui finit par faire regretter la vie « d’avant », celle où on se faisait chier. Au moins on était en sécurité, anonyme au milieu des autres, étouffé mais satisfait. Gisèle FOURNIER sait dépeindre l’âme perdue dans un contexte isolé, ce qui est l’un des thèmes principaux de sa bibliographie. Ce roman est court, amère, acide, il paraît parfait pour affronter l’hiver rigoureux. C’est paru en 2007 chez MERCURE DE France.


(Warren Bismuth)

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