mercredi 20 décembre 2017

Glendon SWARTHOUT « Homesman »


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Aux alentours du milieu du XIXème siècle au Nebraska, dans le comté de Loup, l’hiver est rude et les familles isolées lâchent la rampe. À cause de conditions de vie inhumaines et misérables, quatre femmes sont devenues folles. Leurs maris les rejetant, il va falloir les ramener dans leur famille d’origine en passant par  une Église Méthodiste située dans l’Iowa. Seulement il faut quelqu’un pour convoyer le chargement. Un tirage au sort est censé être effectué entre les quatre maris. Cependant l’un d’entre eux ne veut pas entendre parler de cette mission. C’est une femme des environs, Mary Bee Cuddy, agricultrice célibataire et rustre, qui va se proposer à sa place. Seulement voilà, c’est elle qui est tirée au sort et va devoir endosser le rôle peu envié de « rapatrieur » (« homesman », néologisme pour qualifier la personne choisie). Parallèlement, elle sauve la vie d’un vagabond escroc, George Briggs, spécialiste solitaire des réquisitions de fermes supposées abandonnées, alors qu’il a une corde autour du cou, chevauchant sa monture. En échange de la vie sauve, Mary Bee lui impose de l’accompagner dans cette aventure tumultueuse de plusieurs semaines. Un chariot est construit avec l’aide financière des maris des quatre démentes, des vivres sont donnés. Mary Bee Cuddy et Briggs vont devoir s’entendre bon an mal an au beau milieu de ces femmes ayant perdu la raison, qui ne peuvent même pas pisser seules, mais peuvent accessoirement s’avérer dangereuses, tout comme les rencontres tout au long de ce vrai chemin de croix où par ailleurs la foi est omniprésente. Roadbook lent et désillusionné, sobre et intimiste, l’écriture y est expurgée, sans artifices, comme si chaque mot comptait. On reconnaît toutes les ficelles du western : quelques indiens, des cowboys taiseux, seuls, la rudesse du climat, et bien sûr les grands espaces. Ajoutons-y néanmoins cette Mary Bell un brin féministe. Roman tragique mais pourtant jamais larmoyant, se permettant même de ci de là quelques pointes d’humour (« Il émergea de derrière le bar et suivit son ventre jusqu’au bas de l’escalier »). Alors que des populations entières se déplacent d’est en ouest des Etats-Unis, Mary et George font le contraire, comme pour schématiser la fin du rêve de la conquête de l’ouest (déjà). Ces deux figures sont absolument inoubliables et diablement attachantes malgré leurs nombreux travers bien humains (ou peut-être en partie grâce à ces travers). Ce formidable roman de 1988 fut aussi le dernier de Glendon SWARTHOUT (mort en 1992), il fut brillamment adapté au cinéma par Tommy LEE JONES (qui en outre joue le rôle de Briggs), qui restitue parfaitement le décor du bouquin, en omettant toutefois un épisode un brin érotique contenu dans le roman (pour un résultat plus « hollywoodien » ?), en ne mettant en scène que trois folles, mais en rajoutant un « The » à son titre. Un livre à la fois touchant et sombre qui atteint son but. C’est bien sûr GALLMEISTER qui l’a édité en 2014, sa sortie fut simultanée avec celle du film, nous offrant là une histoire d’une force exceptionnelle servie par une écriture puissante et maîtrisée.

(Warren Bismuth)

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