dimanche 20 mai 2018

Pierre BOISSERIE & Éric STALNER « Saint-Barthélemy »


Les auteurs n’ont pas choisi le sujet le plus léger de l’Histoire de France pour concocter une BD historique sous forme de trilogie. Comme son nom l’indique, il s’agit du massacre de la Saint-Barthélemy en août 1572, saga racontée en 3 tomes d’égale qualité.

     01-   « Sauveterre »

Mise en bouche avec les jours et les heures précédant la boucherie : l’attentat catholique contre le seigneur Gaspard de COLIGNY, noble influent chez les huguenots. La blessure puis la mort de COLIGNY précipiteront les évènements qui donneront lieu à l’un des plus sanglants massacres intérieurs de France. Parallèlement, une fiction est mise en place avec la famille Sauveterre, où deux frères  vont voir leur destin bousculé par leur appartenance à deux religions alors en guerre ouverte. Dans le déroulement des faits, le duc de GUISE est à la manœuvre, manipulant une Catherine de MEDICIS débordée sur sa droite et un roi CHARLES IX dans le déni.

02-   « Tuez-les tous ! »


L’épisode même de la Saint-Barthélemy intervient dans ce deuxième tome, avec la folie collective, les meurtres sans fin, la Seine qui coule rouge du sang des huguenots, les frictions sans fin de la famille Sauveterre, le poids de la royauté pourtant en totale déshérence, la haine inextinguible entre deux peuples au sein du même royaume.

03-   « Ainsi se fera l’histoire »L’après bain de sang, l’incompréhension après une telle extermination collective. Côté fiction, les mystères de la famille Sauveterre sont peu à peu éclaircis tandis que côté Histoire le roi CHARLES IX perd la raison et se réfugie dans sa chambre, reniant le fait qu’il a commandité une pareille horreur. Dénouement classique mais très crédible.


Sans entrer dans les détails, les auteurs restituent pleinement cette ambiance surchauffée de 1572 dans les rues de Paris où les portes de la capitale seront fermées afin de tendre un piège aux protestants sans aucune chance de s’échapper. La partie fictionnelle est somme toute assez banale avec cette famille tiraillée entre deux religions et deux frères devenus ennemis. On n’échappe pas à l’histoire d’amour qui rend le récit plus dilué, moins sanguinaire. Mais le plus intéressant me semble bien sûr le rappel de ce massacre franco-français avec un état royal complètement exsangue et usé, abusé par les intérêts religieux de familles puissantes. Et pendant ce temps-là, les corbeaux ne cessent de voleter sur un Paris ensanglanté.

Côté dessins c’est tout simplement somptueux : visages expressifs, couleurs peu vives, architectures de Paris d’une immense précision, paysages soignés, le tout sans agressivité, avec une maîtrise parfaite des couleurs et de l’environnement. On pourra regretter certaines planches pourtant magnifiques surchargées de dialogues masquant l’œuvre du dessinateur, mais ne crachons pas dans la soupe, car, d’une part cela n’est pas poli, et d’autre part cette trilogie se lit aisément avec une irrémédiable envie de parvenir à sa conclusion. C’est sorti en 2016 et 2017 aux Arènes BD, maison qui publie pas mal de romans graphiques historiques de qualité.


(Warren BISMUTH)

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