Dernière
pièce de théâtre achevée par KOLTÈS
en 1988 avant son décès du sida un an plus tard, ce « Roberto Zucco »
est bien sûr, vous l'aurez sans doute deviné, une biographie du tueur délirant
des 80's Roberto SUCCO.
S'attachant
aux dernières heures du meurtrier avant son suicide, cette pièce stylisée fait
intervenir pas mal de témoins, des proches aux quidams en passant par les
gardiens de prison entre autres, une vingtaine de personnes se succédant ou
dialoguant. Le ton est brut et poétique à la fois, les situations parfois
choquantes (la pièce a fait scandale à sa sortie), une biographie stylisée et
sans concession, à l’écriture soigneuse, pointilleuse et exigeante. Oui ce
Zucco est fou à lier : assassin de ses parents, d'un flic, interné en
hôpital psychiatrique puis évadé, repris et incarcéré, la pièce commence alors
qu'il est juché sur le toit de sa prison, c'est le dernier baroud d'honneur de
l’italien. On va rapidement en savoir plus sur son parcours par ses proches,
par celles et ceux qui l'ont côtoyé d'une manière ou d'une autre, mais aussi
par ses propres rencontres avec l'un ou l'autre des protagonistes, assister
même au meurtre de sa mère, protectrice et dépassée.
Dans
cette pièce, KOLTÈS s'est inspiré du
théâtre classique, même si l'on peut çà et là ressentir les influences du
théâtre contemporain. Support ambitieux que celui de présenter une biographie
par le truchement du théâtre où l'on peut imposer librement un ton, un rythme
différents, en version brut de décoffrage, faire parler l’imaginaire sans
suivre de fil, moins de deux heures pour résumer une vie qui se clôture en
forme de naufrage, une manière bien singulière de redécouvrir ce Roberto
complètement azimuté qui a fasciné l'opinion publique à la fin des années 80
(et fait s'interroger pas mal de professionnels de la psychiatrie).
La
pièce fut écrite la même année que la mort de SUCCO (1988), donc en quelque
sorte le nez dans le guidon. Dans ce livre, des bonus permettent de jouer les
prolongations en compagnie de l'auteur : « Tabataba », un
dialogue tendu entre une sœur et son frère cadet sur fond de Harley Davidson,
« Coco », une esquisse de pièce de théâtre avec Coco CHANEL comme personnage
central (que visiblement KOLTÈS
ne portait pas dans son cœur), le recueil se terminant par « Un hangar, à
l'ouest », interview où KOLTÈS
parle de son travail (notamment pour les pièces « Quai ouest » et
« Combat de nègres et de chiens »), son approche, sa perception du
théâtre, etc. Le tout est sorti en 2001 aux Éditions de Minuit, alors que la
pièce « Roberto Zucco » fut montée en 1990 à Berlin.
(Warren Bismuth)
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