Très courte nouvelle de 1912 où l’auteur
met en scène Georg, dont le meilleur ami est parti s’installer en Russie, à
Saint Petersbourg, fatigué de la vie dans leur pays commun (qui n’est pas
précisé). Seulement, la Russie n’a pas été le paradis espéré et cet ami, loin
de faire fortune, vient de voir son commerce faire faillite bien qu’il continue
à écrire à George qu’il devrait le rejoindre en Russie. De son côté Georg vient
de se fiancer avec une certaine Frieda, mais a préféré taire l’idylle à son ami
afin qu’il ne vienne pas aux noces. En effet, s’il revenait dans son pays
natal, il regretterait sans aucun doute de l’avoir quitté et serait jaloux de
la vie que mène Georg, bien que ce dernier vive toujours avec son père depuis la
mort de sa mère. Georg décide cependant d’écrire la bonne nouvelle à son ami,
ce qu’il fait, fourre la lettre dans sa poche avant d’aller rejoindre son père
avec qui va s’enclencher une discussion très houleuse. « Le verdict »
semble être un écrit charnière. En effet, si l’on croit remarquer une forte
référence aux nouvelles de MAUPASSANT dans l’écriture comme dans l’atmosphère
(KAFKA avait lu MAUPASSANT), il est indéniable que ce texte préfigure la charge
ultra-violente que KAFKA écrira à son propre père en 1919, que là non plus il
ne fera pas parvenir à son destinataire, mais qui sera publiée ultérieurement.
Dans « Le verdict » on découvre un KAFKA encore imprégné de
classicisme, loin du style qui fera plus tard sa renommée et donnera même un adjectif :
Kafkaïen. Ici rien de tout ça, une simple nouvelle sombre à souhait, peut-être
pas le meilleur moyen de découvrir l’univers de l’auteur, mais certainement une
manière d’explorer une facette méconnue. J’ai eu l’immense chance de lire cette
nouvelle au cœur d’un imposant recueil de quelques 1500 pages, traduite à
partir du manuscrit original de 1912, où l’on constate les oublis de
ponctuations diverses (KAFKA avait l’air très fâché avec la ponctuation), les
erreurs de noms des personnages, comme un tout premier jet avant relecture.
KAFKA note qu’il a écrit cette nouvelle en une nuit, entre 22 heures et 6
heures du matin. Elle sera à peine retouchée avant d’être éditée.
(Warren
Bismuth)
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