À quelques mois de la commémoration des 150 ans de la Commune de Paris, une figure de cette lutte s’imposait pour nous y préparer. En 2019, les éditions Libertalia ont fait paraître un excellent recueil d’écrits – mais pas seulement - de l’immense Louise MICHEL, militante anarchiste infatigable et actrice majeure sur les barricades de la Commune. « La proclamation de la Commune fut splendide ; ce n’était pas la fête du pouvoir, mais la pompe du sacrifice : on sentait les élus prêts pour la mort ».
À travers un choix d’articles de journaux, poèmes, extraits de procès (où elle demandera la mort), conférences, lettres, extraits de son livre de mémoires, tracts, textes parfois inédits, ce recueil présenté par Éric FOURNIER tend à faire connaître plus en profondeur la femme publique que fut Louise MICHEL.
Échelonnés de 1861 à la fin de la vie de la combattante (décédée en janvier 1905), ces textes sont autant de coups de poings, de concrétisations de la lutte, de la dissidence. Féministe, femme de cœur, parfois outrancière, Louise MICHEL est tout cela en une seule dame déterminée. Ce recueil est aussi un moyen de dresser, par les propres témoignages de Louise MICHEL, une sorte de biographie.
De sa participation active à la Commune de Paris, en passant par la déportation (aucun texte de cette période ne figure dans le présent livre), ses conférences, ses points de vue sur le pouvoir, l’anarchisme, l’internationalisme, la politique, la peine de mort, la science et la technologie alors en pleins balbutiements (ces thèmes seront pour elle une véritable passion), mais aussi ses propres traits de personnalité, nombreux sont les indices sur le personnage.
L’un des sommets du livre se situe en 1888, lorsque Pierre LUCAS, un fervent catholique, tire sur la militante avec une arme à feu en pleine conférence (la balle ne sera jamais extraite de la tête de Louise). Loin de le condamner, Louise MICHEL l’aide, lui et sa famille, en vue du procès et réclame son acquittement.
Le style d’écriture de Louise MICHEL est rageur et même puissant, parfois exagéré, mais toujours issu du cœur. Une femme entière, débordant de convictions, se battant sans compter pour la justice et contre les puissants. Elle préfère le terme « Respublica » à celui de République qu’elle juge galvaudé par les élites mêmes qui le définissent. Ses luttes sont aussi pour les révoltés kabyles ou états-uniens. Celle pour qui le mariage était de la prostitution légale restera toute sa vie célibataire et sans enfant.
C’est aussi un livre d’anecdotes : en décembre 1880 Louise MICHEL anime une conférence avec Auguste BLANQUI alors en tournée. Épuisé par cette série de meetings, BLANQUI décède quelques semaines plus tard, en janvier 1881. On peut être frappé par l’absence d’analyse visionnaire chez Louise MICHEL. En bref, elle se plante (certes pas toujours), mais avec génie.
Chaque texte est ici présenté par Éric FOURNIER (tout comme la pertinente préface), replaçant les écrits ou conférences dans le contexte politique et social. En fin de volume, nous pouvons redécouvrir des écrits d’hommes illustres en hommage à Louise MICHEL : Victor HUGO, Jules VALLÈS (dans un exécrable hommage en 1879, farci de misogynie et de clichés masculinistes) ou encore Paul VERLAINE.
Ce recueil, dont le titre est celui d’un poème de Louise MICHEL, est disponible chez Libertalia, dans la sublime collection La petite littéraire. Vous voilà fin prêt.es pour envisager sereinement les 150 ans de la Commune de Paris. Des Livres rances devrait vous présenter quelques ouvrages portant sur ce thème durant le premier semestre de 2021.
« L’étoile du progrès éclaire l’avenir. Mais le monde nouveau ne se fera que par la transformation complète de la société ».
https://www.editionslibertalia.com/
(Warren Bismuth)
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