Un ouvrage collectif, un recueil, une
compilation. Un peu plus de 80 pages avec comme point central l'usine Ford en
Gironde, à Blanquefort, usine qui devrait fermer en 2019. Bon, certains
pourront dire – avec raison - qu'une usine de fabrication de bagnoles qui
ferme, c'est un peu la planète qui respire mieux, l'humain qui pollue moins.
C'est un fait. N'empêche que 900 salariés devraient se retrouver sur le carreau
direction Pôle Emploi, d'où cette mobilisation à laquelle Les Éditions
Libertalia prennent plus que leur part en réalisant ce petit bouquin ou cette
grosse brochure, c'est selon, qui vient juste de sortir et issu de diverses
contributions.
L'un des buts du recueil est de se faire
rencontrer deux mondes : le prolétariat et l'art. Ce sont ici les artistes
qui font le premier pas, comme certains écrivains du XIXe siècle ou du début du
XXe pouvaient le faire en France, en Europe, mais aussi aux États-Unis pour les
plus célèbres. Ils offrent une matière première à réflexion, puisent dans leurs
tripes pour proposer des textes de toutes formes. On y trouve aussi des
personnages publics engagés.
À commencer par Philippe POUTOU et son
discours énergique même s'il devrait réviser l'écriture inclusive qui pique un
peu les yeux dans cet écrit. Puis Sorj CHALANDON, mon préféré du recueil (tiens
donc ?) qui livre une nouvelle poignante très DAENINCKXienne, un texte de la
chanteuse JULIETTE qui parle de la chanson en général dans la lutte y compris
celle des classes, Serge HALIMI et sa plume toujours acérée prête à monter au
créneau, Monique PINÇON-CHARLOT et Michel PINÇON pour qui les riches sont
responsables des maux de la société.
Suivent des petits textes très bien sentis
de la romancière Dominique MANOTTI, du romancier Laurent BINET, du tendre mais
révolté comédien François MOREL. Passons sur le très (trop!) prévisible Didier
SUPER (son discours provo facile peut finir par lasser et faire bailler) pour
retrouver un texte très court de l'humoriste Guillaume MEURICE suivi de
quelques pages du romancier Didier CASTINO. Hervé LE CORRE quant à lui propose
une nouvelle assez proche de celle de CHALANDON dans l'esprit. Le volume se
termine par une courte analyse lexicale de Philippe BLANCHET sur le langage utilisé par les médias
locaux pour rendre compte de la lutte sociale à Blanquefort.
N'oublions pas le centre du volume :
quelques pages drôles ou enragées de dessinateurs assez proches de la mouvance
libertaire, tels FAUJOUR ou LASSERPE. Ils sont tout de même 17 crayonneux à
participer à l'aventure, dont PLANTU.
Un petit objet qui fait chaud au cœur,
tant on a le sentiment que les mobilisations actives contre l'ogre capitaliste
tendent à se raréfier en ces temps où réussir peut être précisément écraser
l'autre (la compétition, mère de tous les vices). Les artistes du présent
recueil se sont mouillés, les mains enfouies bien profond dans l'encrier, pour
en ressortir leurs mots propres sur un sujet collectif. Très belle initiative,
très joli résultat, couverture toujours soignée, rouge et noire comme pour nous
rappeler quelque chose.
http://www.editionslibertalia.com/
(Warren Bismuth)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire