Nul besoin d’être adepte de la Petite
Reine pour lire et être rapidement happé par cette biographie de Marco PANTANI,
coureur cycliste professionnel italien, décédé mystérieusement en 2004.
La
carrière de PANTANI fut riche et chaotique, émaillée d’exploits presque
surhumains, mais aussi de lourdes chutes et de nombreux déboires. Prodige des
courses de montagne, c’est un lion qui se réveille dès que la chaussée se fait
plus pentue, dans ces montagnes d’Italie ou de France.
PANTANI
a impressionné, subjugué le public, par ses performances extraordinaires. Après
avoir épaulé son maître CHIAPPUCCI (le « Claudio » du récit), il l’a
rapidement surclassé avec une rare maestria. Son nom a rejoint les ténors de la
haute montagne.
Son
palmarès est d’autant plus élogieux qu’il se situe dans un laps de temps très
bref. Tour de France : vainqueur du classement du meilleur jeune en 1994
(se classant 3ème au final) et 1995, 3ème en 1997 et
vainqueur en 1998, huit victoires d’étapes en cinq participations. Tour
d’Italie : 2ème en 1994, vainqueur en 1998 (faisant de PANTANI
l’un des rares coureurs réussissant la même année le doublé Tour de France Tour
d’Italie), huit victoires d’étapes là encore en neuf participations. En revanche
le Tour d’Espagne restera pour lui un échec, deux participations, il ne
bouclera aucune des deux, ne remportant aucune étape. En 1995, il sera sur la troisième
place du podium lors des championnats du monde sur route.
Ce
qui saisit dans cette biographie, c’est la très rapide descente aux enfers de
la nouvelle coqueluche du cyclisme mondial. Sans revenir sur ses chutes à
répétition – certaines graves et lui valant des semaines d’hôpital -, il est
pour la première fois contrôlé positif lors d’un contrôle anti-dopage lors
d’une course classique, il n’aura plus jamais la paix. L’EPO vient de débarquer
avec fracas dans le monde du cyclisme professionnel. D’autres contrôles
positifs vont suivre, accélérant la déchéance. Ses performances vont s’en trouver
rapidement altérées, comme son moral. Il va divorcer, s’adonner aux
stupéfiants, devenir noctambule acharné, faire la fête pour soigner son
mal-être, raccrocher son vélo tant aimé. Son corps sans vie sera retrouvé dans
une chambre d’Hôtel de Rimini en Italie le 14 février 2004, jour de la Saint
Valentin, comme un ultime pied de nez au désamour, du sportif par ses fans tout
d’abord, puis de l’homme par ses proches. Une fin des plus pathétiques pour un
champion hors pair.
En
98 instantanés non paginés, Jacques JOSSE retrace la vie tourmentée de ce
sportif chevronné, employant les mots justes, narrant les exploits, les
défaites, les grands moments d’une carrière cacophonique jusqu’au décès brutal.
L’auteur admire le modèle qu’il peint, aucun doute là-dessus. JOSSE se plaît à
parler de ces estropiés de la vie au destin tragique, il le fait brillamment
pour les petites gens, les oubliés de l’Histoire, les locaux, les vraies
gueules de villages, de hameaux. Il sait aussi le faire à la perfection pour
les célébrités, de préférence celles qui ont mal fini. À chaque fois les abus,
l’alcool, le tabac, ici la cocaïne. Toujours la détresse. JOSSE est un
biographe hors normes, un conteur assidu qui pèse chaque mot pour l’imbriquer
avec perfection dans une phrase, réussissant chaque fois un bijou de premier
ordre. Ce petit joyau à lire d’une traite est paru en 2015 chez les formidables
éditions de La Contre Allée et c’est un sacré tour d’honneur en roue libre.
(Warren
Bismuth)
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