Le livre s’ouvre sur un court portrait de
Gustave COURBET, peintre du XIXe siècle, acteur de la Commune de Paris en 1871,
accusé d’être l’un des instigateurs de la destruction de la colonne Vendôme.
Cette Commune, Marie COSNAY va la décrire, au présent, se rapprocher des
barricades, au plus près. D’autres figures marquantes de cette révolution
manquée vont être dépeintes dans ce récit résolument politique.
De l’intrépide Gustave FLOURENS à Charles
DELSCLUZE ou Eugène VARLIN, Auguste VERMOREL (tous quatre paieront leur
engagement de leur vie) en passant par l’insaisissable Louise MICHEL et son ami
Théophile FERRÉ sans oublier les frères Élie et Élisée RECLUS, Maxime LISBONNE
(entraperçu) mais aussi les anonymes, tous ceux et toutes celles (car les
femmes furent nombreuses à se battre) qui ont construit la Commune, cette
utopie prenant vie au cœur de la capitale française alors exsangue. Les noms
des victimes tuées sur le champ de bataille vont être égrenés, comme sur un monument
commémoratif.
Marie COSNAY raconte, revient
chronologiquement en arrière comme si elle avait oublié des détails en chemin.
Elle s’est en partie basée sur l’une des plus grosses références de cette
insurrection, l’indispensable « Histoire de la Commune de Paris » de
Prosper LISSAGARAY écrite dans le feu de l’action (lecture marquante il y a
pourtant bien longtemps). L’auteure expurge avec minutie, livrant l’essentiel
dans le chaos assourdissant d’une période où le chassepot donne le rythme.
« À Satory, 1685 prisonniers sont
enfermés, les uns contre les autres, dans un magasin de fourrage. Ils se
relaient pour s’allonger un moment sur la paille humide et n’ont pour boire que
l’eau de la mare où pissent les gardiens ».
Retour en arrière avec le sinistre Arthur de
GOBINEAU (qui sera aussi romancier) et ses écrits sur l’inégalité des races dès
1853, Marie COSNAY en profite pour glisser quelques lignes sur la colonisation.
L’Histoire se croise, s’entremêle, notamment par la figure d’Emmy/Madeleine qui
traverse avec souffrances ce XIXe siècle.
Et ces questions, incessantes,
nécessaires : « À quel besoin
de l’homme répond l’action révolutionnaire ? La solitude est-elle
l’essence de la condition humaine ? Quels sont les nombreux facteurs,
éminemment dignes d’intérêt, d’où naissent les actions révolutionnaires de
masse ? ».
Étape essentielle avec le programme de la
Commune, égalitaire, inconcevable pour les troupes réactionnaires de
Versailles, d’où les exécutions sommaires, la Seine qui se teinte de rouge, témoin
privilégié d’une barbarie sans nom. Ce livre est un hommage sans conditions à
celles et ceux qui ont essayé, pensé sinon la révolution, en tout cas la
révolte et l’insurrection.
Marie COSNAY n’est pas naïve, elle rappelle
les nombreux infiltrés au sein des Communards, les flics déguisés en émeutiers.
Et puis les écrivains qui se sont levés contre ce dangereux idéal : George
SAND, Gustave FLAUBERT, Alphonse DAUDET, Théophile GAUTIER, ces bourgeois qui
craignaient pour leurs privilèges personnels.
La Commune, mais pas seulement : images
brèves d’un Henry-David THOREAU construisant les fondements d’une société
égalitaire et apaisée aux États-Unis, de ce Père Ramon SENDER combattant avec
les anarchistes dans l’Espagne de 1936. Le livre se clôt au Paraguay.
L’insurrection a sa place partout, préconisée et déifiée.
Dans une année, nous fêterons les 150 ans
l’avènement de la Commune de Paris, peut-être avec flonflons et force espoir,
certainement avec le respect qui s’impose. Ce bouquin est là pour nous permettre
de réviser un peu plus l’Histoire, et pourquoi pas recommencer ? Sorti en
2012, pour la version papier ce sont les impeccables Quidam qui ont permis la
parution. Pour la version électronique, ce sont les non moins talentueux
publie.net, on ne peut que s’en réjouir.
(Warren
Bismuth)
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