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dimanche 29 avril 2018

Pierre VIDAL-NAQUET « Les crimes de l’armée française – Algérie 1954-1962 »


Résultat de recherche d'images pour "vidal naquet les crimes de l'armée"Ce documentaire choc n’est pas à proprement parler un bouquin de VIDAL-NIQUET mais plutôt une compilation réalisée par ses soins. Certes, il intercale des paragraphes qu’il a lui-même écrits, mais ceux-ci étaient déjà parus ailleurs, sortis par d’autres sources. Ce livre est une réédition chez La Découverte (en 2001) d’un documentaire de chez François Maspero en 1975, agrémenté d’une préface inédite de VIDAL-NAQUET.

Est balayée ici toute la période de la guerre d’Algérie, même si l’auteur revient brièvement sur la guerre d’Indochine. Je ne vais pas vous le cacher plus longtemps, il est surtout question des tortures infligées aux algériens en Algérie par l’armée française, elle-même parfois couverte par le pouvoir en place à Paris (certes les tortures de l’autre camp sont également évoquées. Tous les faits décrits sont des témoignages déjà publiés entre 1949 et 1962, il s’agit donc bien là d’une compilation des plus macabres).

Pourquoi la torture ? Certains tortionnaires répondent que c’était le seul moyen d’obtenir des renseignements afin de sauver des vies. Mieux : la torture est devenue rapidement une institution puisqu’elle est apprise en cours par les appelés de l’armée française, qui de la théorie passent vite à la pratique en assistant parfois eux-mêmes aux tortures (mais sans y participer activement) et y apprennent les rouages et les modes d’utilisation.

Bien sûr il y a des cas de conscience : « Au cours de discussions, ils m’ont dit qu’ils doutaient de la civilisation qu’ils représentaient », mais ils sont une minorité puisque pour la plupart des coupables, c’est le cynisme en temps de guerre qui prévaut : « Fais-lui sauter la cervelle… Non, c’est dommage de salir une couverture, éjecte-le du brancard ». Des phrases chocs de cet acabit, il en est question dans ce livre qui fit scandale à sa sortie, alors que la torture, spécialement en Algérie, était frappée d'une grande omerta nationale. Ici les tortionnaires témoignent, mais aussi ceux qui ont été victimes, comme ceux qui ont dénoncé la torture. VIDAL-NAQUET ressort du placard des extraits de son livre « La raison d’Etat » sorti en 1962 aux Editions de Minuit juste après les accords d’Evian.

Ce bouquin, bien que dur par les détails de tortures, les traumatismes et les conditions d’interrogatoires, est un élément saisissant, un témoin clé des atrocités en Algérie entre 1954 et 1962, afin de mieux comprendre que seulement quelques années après la chute du nazisme, et bien que tout le monde s’était allié contre le IIIe Reich, ses méthodes étaient en partie reprises sur le sol français, en version colonisée, le tout ponctué d’un rare sadisme où « l’étranger » était vu comme une bête, une vermine à exécuter. Précision utile : la France avait soi-disant apporté la civilisation dans ces contrées de sauvages…

(Warren Bismuth)

 

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