Au printemps 1942 se forme une petite
organisation de résistance à l’ogre nazi, La rose blanche.
Particularités : elle est allemande, chrétienne, et émanant de militant.es
qui dans les années 30 avaient pourtant tellement vus d’un bon œil le Reich
d’HITLER que certain.es avaient adhéré aux jeunesses hitlériennes. C’est à
Munich que le projet est fécondé, tout d’abord par deux hommes, Hans SCHOLL et
Alexander SCHMORELL, rapidement rejoints par la sœur d’Hans, Sophie, ainsi que
certains proches. Six personnes composent le noyau dur.
C’est surtout par le biais de tracts
offensifs que se résume leur action. Le but de ces tracts est d’inonder le
territoire allemand, éveiller les consciences face au nazisme. « Sophie habitait Munich depuis à peine six
semaines quand un événement extraordinaire se produisit à l’université. Des
tracts passaient de main en main ; une émotion très vive régnait parmi les
étudiants. Un sentiment complexe fait de triomphe, d’enthousiasme, de dégoût et
d’indignation s’éveillait en eux ». Que disent ces tracts en substance ?
« Il n’est rien de plus indigne d’un
peuple civilisé que de se laisser, sans résistance, régir par l’obscur bon
plaisir d’une clique de despotes… ». L’offensive est lancée malgré la
pénurie de papier. De plus, des graffitis hostiles au Reich commencent à
fleurir sur les murs.
Mais environ un an après le début de
l’aventure, les membres de La rose blanche sont arrêtés, Hans et Sophie en
tête. Interrogatoires, simulacre de procès débouchant sur des condamnations à
mort, effectuées immédiatement en février 1943. C’est l’aînée de la fratrie,
Inge SCHOLL, qui décide en 1955 d’écrire l’histoire de La rose blanche, de son
frère et de sa sœur. Si le style n’est pas parfait, le fond est un élément
historique incontournable de la résistance de l’intérieur, où de simples
citoyens jouent leur vie pour faire chuter l’État nazi.
Ce qui frappe dans ce document, c’est la
relation quasi charnelle à Dieu. Une famille de chrétiens pratiquants. Donc ici
il n’est nullement question de révolution ni de l’avènement du gauchisme, mais
bien une opposition directe et frontale à l’horreur. Ce court récit est
augmenté de retranscriptions de certains des tracts de La rose blanche. Là
encore, stupéfaction : la religion tient une place de poids : « Aussi faut-il que tout individu prenne
conscience de sa responsabilité en tant que membre de la civilisation
occidentale chrétienne », les références au diable, à Satan sont
nombreuses et parfois pesantes, je vous les épargnerai. Cependant, la lutte, la
vraie, est palpable dans des extraits magnifiques et sulfureux : « Et maintenant, la fin est proche. Il s’agit
de se reconnaître les uns les autres, de s’expliquer clairement d’hommes à
hommes ; d’avoir ce seul impératif sans cesse présent à l’esprit ; de
ne s’accorder aucun repos avant que tout allemand ne soit persuadé de l’absolue
nécessité de la lutte contre ce régime. Si une telle vague de soulèvement
traverse le pays, si quelque chose est enfin ˝dans l’air˝, alors et alors
seulement, ce système peut s’écrouler. Le dernier sursaut exigera toutes nos
forces. La fin sera atroce, mais si terrible qu’elle doive être, elle est moins
redoutable qu’une atrocité sans fin ».
Le dernier tract avant l’arrestation des
membres de l’organisation est le plus violent, le plus virulent, le plus beau
aussi. Ce qu’il faut retenir de cette expérience, c’est que l’Église ne suivit
pas toujours les préceptes de collaboration, de la papauté notamment, qu’elle
s’est rebellée et s’est organisée pour agir concrètement. Et même si la
religion prend une grande place dans le présent récit, n’oublions pas le combat
d’humains, même si encore une fois ceux-ci ne furent pas révolutionnaires en un
temps pourtant inspirant pour l’apocalypse.
Sorti en France en 1955 aux
incontournables éditions de Minuit, il fut dans cette maison réédité à maintes
reprises, la dernière version poche date de 2018.
(Warren
Bismuth)
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