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mardi 21 janvier 2020

Inge SCHOLL « La rose blanche – Six allemands contre le nazisme »


Au printemps 1942 se forme une petite organisation de résistance à l’ogre nazi, La rose blanche. Particularités : elle est allemande, chrétienne, et émanant de militant.es qui dans les années 30 avaient pourtant tellement vus d’un bon œil le Reich d’HITLER que certain.es avaient adhéré aux jeunesses hitlériennes. C’est à Munich que le projet est fécondé, tout d’abord par deux hommes, Hans SCHOLL et Alexander SCHMORELL, rapidement rejoints par la sœur d’Hans, Sophie, ainsi que certains proches. Six personnes composent le noyau dur.

C’est surtout par le biais de tracts offensifs que se résume leur action. Le but de ces tracts est d’inonder le territoire allemand, éveiller les consciences face au nazisme. « Sophie habitait Munich depuis à peine six semaines quand un événement extraordinaire se produisit à l’université. Des tracts passaient de main en main ; une émotion très vive régnait parmi les étudiants. Un sentiment complexe fait de triomphe, d’enthousiasme, de dégoût et d’indignation s’éveillait en eux ». Que disent ces tracts en substance ? « Il n’est rien de plus indigne d’un peuple civilisé que de se laisser, sans résistance, régir par l’obscur bon plaisir d’une clique de despotes… ». L’offensive est lancée malgré la pénurie de papier. De plus, des graffitis hostiles au Reich commencent à fleurir sur les murs.

Mais environ un an après le début de l’aventure, les membres de La rose blanche sont arrêtés, Hans et Sophie en tête. Interrogatoires, simulacre de procès débouchant sur des condamnations à mort, effectuées immédiatement en février 1943. C’est l’aînée de la fratrie, Inge SCHOLL, qui décide en 1955 d’écrire l’histoire de La rose blanche, de son frère et de sa sœur. Si le style n’est pas parfait, le fond est un élément historique incontournable de la résistance de l’intérieur, où de simples citoyens jouent leur vie pour faire chuter l’État nazi.

Ce qui frappe dans ce document, c’est la relation quasi charnelle à Dieu. Une famille de chrétiens pratiquants. Donc ici il n’est nullement question de révolution ni de l’avènement du gauchisme, mais bien une opposition directe et frontale à l’horreur. Ce court récit est augmenté de retranscriptions de certains des tracts de La rose blanche. Là encore, stupéfaction : la religion tient une place de poids : « Aussi faut-il que tout individu prenne conscience de sa responsabilité en tant que membre de la civilisation occidentale chrétienne », les références au diable, à Satan sont nombreuses et parfois pesantes, je vous les épargnerai. Cependant, la lutte, la vraie, est palpable dans des extraits magnifiques et sulfureux : « Et maintenant, la fin est proche. Il s’agit de se reconnaître les uns les autres, de s’expliquer clairement d’hommes à hommes ; d’avoir ce seul impératif sans cesse présent à l’esprit ; de ne s’accorder aucun repos avant que tout allemand ne soit persuadé de l’absolue nécessité de la lutte contre ce régime. Si une telle vague de soulèvement traverse le pays, si quelque chose est enfin ˝dans l’air˝, alors et alors seulement, ce système peut s’écrouler. Le dernier sursaut exigera toutes nos forces. La fin sera atroce, mais si terrible qu’elle doive être, elle est moins redoutable qu’une atrocité sans fin ».

Le dernier tract avant l’arrestation des membres de l’organisation est le plus violent, le plus virulent, le plus beau aussi. Ce qu’il faut retenir de cette expérience, c’est que l’Église ne suivit pas toujours les préceptes de collaboration, de la papauté notamment, qu’elle s’est rebellée et s’est organisée pour agir concrètement. Et même si la religion prend une grande place dans le présent récit, n’oublions pas le combat d’humains, même si encore une fois ceux-ci ne furent pas révolutionnaires en un temps pourtant inspirant pour l’apocalypse.

Sorti en France en 1955 aux incontournables éditions de Minuit, il fut dans cette maison réédité à maintes reprises, la dernière version poche date de 2018.


(Warren Bismuth)

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