Alors Carcasse reste figé là, devant cette
porte, et le pire est qu’il y paraît heureux. Il observe le monde autour de
lui, les « Plusieurs autour » qui entament certains paragraphes de ce
petit roman poétique et sensoriel. Carcasse accomplit un voyage intérieur, au
cœur de lui-même, étranger au monde qui l’entoure, un voyage de l’esprit dans
une totale immobilité, avec ses pieds scellés au sol. Voyage sensitif durant
lequel Carcasse s’agite sans bouger, comme absent de son corps. Et les
« Plusieurs autour » qui en viennent à le regarder drôlement, de plus
en plus ostensiblement.
« Alors Carcasse » est une œuvre
tout en finesse contre les préjugés sur la différence. Le personnage de
Carcasse peut rappeler fortement certaines figures de Samuel BECKETT par sa
description, ceux qui attendent on ne sait quoi, qui stagnent, qui restent dans
une pièce, voire sur un lit. « C’est
qu’il faudrait maintenant beaucoup de force, pour faire descendre Carcasse du
sommet de ses pieds ».
Carcasse est ce colosse aux pieds d’argile
qui « efface ses propres traces
avant de les avoir laissées ». Ce roman est aussi un conte, un peu onirique,
au style très choyé, petit bijou distillant l’humour. Carcasse est ce
personnage qui ne parle pas, ne bouge pas (du moins pas à partir du bas de son
bassin), mais qui sait paraître tendre et attachant. « Alors
Carcasse » est sorti dans la magnifique collection Grands Fonds de chez
Cheyne éditeur en 2011, il vous séduira par sa tendresse et sa sensibilité
autant que par son absurdité poétique.
https://www.cheyne-editeur.com/
(Warren
Bismuth)
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