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vendredi 15 novembre 2019

Jim HARRISON & Gary SNYDER « Aristocrates sauvages »


Entretien entre deux figures emblématiques de la littérature « Beat » états-unienne. Jim HARRISON pose les questions ou donne le tempo tandis que Gary SNYDER répond, développe et anecdotise. SNYDER témoigne de son expérience de vie. Attiré très tôt par la culture zen et le bouddhisme, il a vécu une dizaine d’années au Japon, d’où il en a retiré une culture de vie très personnelle et spirituelle.


Mais dans cet ouvrage c’est surtout de nature dont il sera question. Les deux auteurs sont proches d’elle, lui ont dédiés de nombreuses pages, de nombreux chapitres. Leur philosophie naturaliste peut se voir comme complémentaire, c’est en tout cas la sensation dans ces échanges d’une grande beauté. « Je marchais un jour dans les montagnes de la Sierra Nevada, parmi les talus d’éboulis, en regardant mes pieds. Et j’ai alors remarqué que chaque caillou était différent. Il n’y avait pas deux pierres identiques. Il n’y a donc peut-être pas d’identité dans l’univers, pas deux choses exactement semblables ». C’est SNYDER qui parle.

Cet entretien peut être lu comme une biographie rapide de Gary SNYDER, il donne quelques détails sur certaines expériences de sa vie, certaines conclusions que le poète a pu en tirer. Quant à HARRISON, il est l’intervieweur donc il prend peu la parole, souvent pour acquiescer aux dires de son interlocuteur, ou pour bien sûr, sortir une plaisanterie dont il a le secret. Les deux poètes sont de la même génération (SNYDER, né en 1930, HARRISON en 1937) et les souvenirs de l’un peuvent raviver une flamme chez l’autre. SNYDER tient en revanche le gouvernail dès qu’il s’immisce dans la culture orientale et asiatique.

Les animaux : SNYDER les respecte, peut-être même les révère-t-il. « Nous sommes encore dans une phase où l’on apprend à connaître les animaux, à interagir avec eux. Les inclure dans notre dialogue est déjà une grande nouveauté ». Le progrès : « L’Amérique est maintenant à soixante-quinze pour cent urbaine. Quand je suis né, c’était l’inverse : elle était à soixante-quinze pour cent rurale. Pour un gars de la campagne comme moi, le problème est que le niveau d’attention dont j’ai besoin en ville m’épuise très vite ». Cependant, ne vous attendez pas à obtenir de criantes révélations sur la vie de Jim HARRISON puisque le bouquin est tout de même consacré avant tout à SNYDER.

À l’issue de cet entretien sont proposés 18 poèmes de SNYDER en version bilingue avant une longue postface d’Antoine WYSS. Au début et à la fin de l’ouvrage, des photographies de la collection personnelle de Gary SNYDER mais pas que. Même si leur impression ne ressort pas forcément par manque de qualité, elles sont là pour témoigner elles aussi.

Enfin, ce joli livre est accompagné… d’un DVD, « La pratique sauvage » ! Il est en quelque sorte la version filmée de ce face à face de deux géants (mais pas tout à fait non plus, je vous laisse la surprise), mais aussi des lectures des poèmes de Gary SNYDER par lui-même, ainsi que des prises de paysages somptueux. De nombreuses interviews viennent étoffer le DVD. Le tout est sorti en 2011 dans la collection Tête nue de Wildproject éditions.


(Warren Bismuth)

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