Victor JESTIN est un jeune auteur de 25 ans,
« La Chaleur », son premier roman, figure en bonne place de la
rentrée littéraire, chez Flammarion.
Ce court roman (139 pages) nous relate la
vie d’un adolescent de 17 ans, Léonard, en vacances au mois d’août, dans un
camping des Landes. Jusque-là, c’est très banal. Ce qui l’est moins, c’est
l’instantané que nous propose Victor JESTIN de la vie de ce jeune homme.
Léonard est un personnage très banal :
se trouvant malingre, détestant le soleil, la chaleur, le bruit, il se retrouve
parachuté en vacances avec sa famille sans l’avoir réellement choisi (ni désiré
d’ailleurs). Au fil des pages, nous comprenons qu’il est originaire de Lorient.
Le narrateur se repère rapidement : il est celui qui cherche les accès
ombragés, celui qui refuse d’ôter son tee-shirt et de dévoiler son corps, celui
qui assiste, passif, aux amourettes naissantes, sans arriver précisément à s’y
retrouver.
Louis c’est son copain de vacances, Louis il
a vraiment envie de conclure avec une fille, alors il est connecté
régulièrement à Tinder et fait défiler compulsivement les visages et les
corps des jeunes filles inscrites présentes dans le périmètre du camping. Il
envoie des perches à tout ce qui bouge et dans le laps de temps où se situe le
récit, il rencontre Zoé, accompagnée de sa copine Luce. Si la relation de Louis
et de Zoé va se terminer en eau de boudin, sous-tendue par une vague
d’humiliation sans borne, Léonard va se lier avec Luce, la fille que l’on pourrait
qualifier de populaire, et qui volette d’un garçon à un autre mais sans jamais
lui donner ce qu’il veut.
Louis va donc faire connaissance avec ses
premiers émois mais tout n’est pas aussi simple : l’ambiance globale du
séjour prend une tournure particulière quand, une nuit, sur l’aire de jeux des
enfants, il se retrouve nez-à-nez avec Oscar, jeune garçon du même âge,
manifestement passablement alcoolisé, qui vient de s’entortiller le cou autour
d’une corde de balançoire. Acte à mettre sur le compte de l’enivrement
manifestement. Louis assiste à la scène, les yeux dans ceux de celui qui
s’étouffe et qui n’est visiblement pas satisfait de son destin funeste.
Sidération, fascination ? Impossible de
répondre à cette question mais le fait est que Louis ne portera pas assistance
à Oscar qu’il regardera mourir. La prise de conscience sera tardive :
c’est lui l’auteur de ce crime, il doit le cacher, vite, à l’écart des regards
des autres jeunes qui commencent à regagner leur tente après la fête. Entre
culpabilité et sentiment amoureux, Léonard va vivre 36 heures déterminantes
pour sa vie. Partagé entre ses découvertes, sa famille, il est confronté à un
choix douloureux : avouer ou pas ? Et à qui ? La mère d’Oscar,
Claire ? Luce ? Ses propres parents qu’il voit comme une zone de
confort rassurante ?
36 heures, la fin d’un séjour, le retour à
la réalité, tout passe à une vitesse folle, à l’image de la lecture de ce roman
qui est brève, comme un coup de tonnerre dans le ciel. Léonard voit s’égrener
le temps au rythme de la peur de la découverte de son crime, quelle chute
pouvons-nous espérer ?
Roman qui tient en haleine le lecteur, je
regrette pour ma part une fin trop attendue, le revirement espéré qui
permettrait de sortir d’une vision manichéenne du monde n’a pas lieu et
j’avoue, j’ai envie de gifler le narrateur.
« La Chaleur » de cette fin août
caniculaire, de ces corps qui s’échauffent au contact des uns et des autres, la
chaleur de la honte, de la culpabilité, tout est intimement lié. C’est un roman
sans prétention mais qui est efficace, qualité déjà estimable pour une première
fois, à l’image de la première fois de Léonard.
Bonne continuation à ce nouvel auteur !
(Emilia Sancti)
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