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jeudi 26 septembre 2019

Gilles VINCENT-CABOUD « Les vies inférieures »


Une chronique découverte. Découverte à la fois d’un auteur, Gilbert VINCENT-CABOUD et aussi des éditions Brandon.

Cet ouvrage m’a intéressée dans un premier temps grâce aux lieux où se tient l’action : la Chartreuse, Voiron, Coublevie, Le Grand Lemps… que des paysages connus et aimés que je peux visualiser même les yeux clos. Deux narrations se font face et alternent, chapitre après chapitre : l’histoire d’une lignée, qui prend sa source au XIIIe siècle et l’histoire de Jean, qui démarre au milieu du XXe siècle. Rapidement nous serons amenés à comprendre qu’il s’agit de la généalogie de Jean Noiraud. Sur ce point précisément, chapeau bas, l’auteur arrive à nous confier la complexité des familles, des liens et des amours tout en gardant un propos clair, que l’on arrive à suivre.

Il ne serait pas pertinent de rentrer dans les détails, gardons l’essentiel : depuis le XIIIe siècle, la lignée des Noiraud se veut contestataire, va au bout de ses convictions, s’engage farouchement dans ce qui lui tient à cœur et tient mordicus à cette volonté de justice qui l’anime. C’est ce qui est central dans tout le roman : la lutte des classes. A la manière de la garance voyageuse qui pousse partout même là où on ne l’attend pas, les Noiraud résistent, et même repoussés, traqués, ils savent tirer parti de leur environnement afin de perdurer.

La boucle est bouclée dans les derniers chapitres du roman : Jean découvre ses ancêtres, se découvre orateur et cherche à défendre les plus modestes grâce à son don. Loin d’une trajectoire irréprochable, Jean est simplement un homme, qui se cherche, qui oscille entre l’acceptation de ses origines modestes et ses envies de nourritures intellectuelles, ponctuées de mirages offerts par la petite bourgeoisie. C’est sur le tard que Jean comprendra son but et son rôle dans la société :

« Il y a, dans toutes ces vies inférieures, un souffle de bonheur qui n’a besoin ni de pouvoir ni d’argent pour croître et embellir. C’est là qu’il faut creuser, Jean, dans ce souffle ».

Loin des clichés habituels sur le sujet, absolument pas manichéen, ce roman a un petit goût de ZOLA tout en étant moins noir et se terminant sur une note globale d’espoir. Note d’espoir qui est à modérer car l’on se demande comment va se poursuivre la lignée des Noiraud. Je n’en dirai pas davantage.

L’écriture est soignée, tout en restant simple, à l’image des individus qui sont racontés : la plume est précise et les images variées.

Ce roman de 412 pages est servi dans un très bel objet d’un format original, grand comme la main, léger malgré une impression de qualité sur un papier au grammage supérieur. Des coins arrondis, une couverture cartonnée, un logo en relief soigné, on prend du plaisir grâce aux mots mais aussi grâce à l’emballage. Cela ne gâche rien, bien au contraire. Je vous engage donc vivement à regarder le catalogue de cet éditeur avec attention, pour ma part j’ai pris un grand plaisir, grâce à Olivier qui a su me faire confiance en me confiant cette lecture. Vivement la prochaine !


(Emilia Sancti)

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