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dimanche 24 février 2019

Jacques JOSSE « Marco Pantani a débranché la prise »


Nul besoin d’être adepte de la Petite Reine pour lire et être rapidement happé par cette biographie de Marco PANTANI, coureur cycliste professionnel italien, décédé mystérieusement en 2004.

La carrière de PANTANI fut riche et chaotique, émaillée d’exploits presque surhumains, mais aussi de lourdes chutes et de nombreux déboires. Prodige des courses de montagne, c’est un lion qui se réveille dès que la chaussée se fait plus pentue, dans ces montagnes d’Italie ou de France.

PANTANI a impressionné, subjugué le public, par ses performances extraordinaires. Après avoir épaulé son maître CHIAPPUCCI (le « Claudio » du récit), il l’a rapidement surclassé avec une rare maestria. Son nom a rejoint les ténors de la haute montagne.

Son palmarès est d’autant plus élogieux qu’il se situe dans un laps de temps très bref. Tour de France : vainqueur du classement du meilleur jeune en 1994 (se classant 3ème au final) et 1995, 3ème en 1997 et vainqueur en 1998, huit victoires d’étapes en cinq participations. Tour d’Italie : 2ème en 1994, vainqueur en 1998 (faisant de PANTANI l’un des rares coureurs réussissant la même année le doublé Tour de France Tour d’Italie), huit victoires d’étapes là encore en neuf participations. En revanche le Tour d’Espagne restera pour lui un échec, deux participations, il ne bouclera aucune des deux, ne remportant aucune étape. En 1995, il sera sur la troisième place du podium lors des championnats du monde sur route.

Ce qui saisit dans cette biographie, c’est la très rapide descente aux enfers de la nouvelle coqueluche du cyclisme mondial. Sans revenir sur ses chutes à répétition – certaines graves et lui valant des semaines d’hôpital -, il est pour la première fois contrôlé positif lors d’un contrôle anti-dopage lors d’une course classique, il n’aura plus jamais la paix. L’EPO vient de débarquer avec fracas dans le monde du cyclisme professionnel. D’autres contrôles positifs vont suivre, accélérant la déchéance. Ses performances vont s’en trouver rapidement altérées, comme son moral. Il va divorcer, s’adonner aux stupéfiants, devenir noctambule acharné, faire la fête pour soigner son mal-être, raccrocher son vélo tant aimé. Son corps sans vie sera retrouvé dans une chambre d’Hôtel de Rimini en Italie le 14 février 2004, jour de la Saint Valentin, comme un ultime pied de nez au désamour, du sportif par ses fans tout d’abord, puis de l’homme par ses proches. Une fin des plus pathétiques pour un champion hors pair.

En 98 instantanés non paginés, Jacques JOSSE retrace la vie tourmentée de ce sportif chevronné, employant les mots justes, narrant les exploits, les défaites, les grands moments d’une carrière cacophonique jusqu’au décès brutal. L’auteur admire le modèle qu’il peint, aucun doute là-dessus. JOSSE se plaît à parler de ces estropiés de la vie au destin tragique, il le fait brillamment pour les petites gens, les oubliés de l’Histoire, les locaux, les vraies gueules de villages, de hameaux. Il sait aussi le faire à la perfection pour les célébrités, de préférence celles qui ont mal fini. À chaque fois les abus, l’alcool, le tabac, ici la cocaïne. Toujours la détresse. JOSSE est un biographe hors normes, un conteur assidu qui pèse chaque mot pour l’imbriquer avec perfection dans une phrase, réussissant chaque fois un bijou de premier ordre. Ce petit joyau à lire d’une traite est paru en 2015 chez les formidables éditions de La Contre Allée et c’est un sacré tour d’honneur en roue libre.


(Warren Bismuth)

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