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mardi 14 juillet 2020

Wadiaa FERZLY « Gangrène »


« Gangrène » est une pièce de théâtre syrienne découpée en deux parties et dix tableaux. D’une discussion entre deux amies à propos de l’avortement à un dialogue entre époux sur l’envie de fuir leurs terres, la Syrie, il sera fait état d’autres échanges politiques sur l’état du pays, les femmes, les couples, la jeunesse, et une famille déplacée des zones de combats.

Najouà, esthéticienne, raconte la gangrène de son père. Il s’est fait amputer pour continuer à vivre. Cette gangrène représente l’état de la Syrie. La sœur de Najouà est mariée, lui vient d’être licencié d’un travail fort étrange : salarié d’une plateforme téléphonique, il devait en espionner les clients. Il a fini par brancher ses écoutes sur sa propre femme, qui l’a su et qui pourrait bien rapidement décider de le quitter, alors que leur fils fait l’école buissonnière et possède de gros besoins…

Dans une Syrie à feu et à sang, nous croisons de petits bouts de scènes qui donnent espoir : des femmes qui fument, des couples qui s’embrassent. Quant tout à coup le drame, un chauffeur de taxi excédé, puis la mort…

Deux parties très distinctes dans cette pièce : avant et après la mort en question (dont je ne dévoilerai rien). Ce qui les relie, c’est la guerre. « Tu n’entends pas les avions, les bombardements ? Du jour où nous l’avons quittée, cette maison a cessé de nous appartenir. Ton argent, tu as plus de droit dessus que la banque ou que l’Etat, puisque la maison, on ne la récupérera pas. Quand tu paies des traites pour une maison qui n’est plus à toi, c’est comme si tu disais aux banquiers : ‘Venez me voler ! Venez sucer mon sang, encore et encore !’ Ça suffit, maman ! Ce que nous subissons, c’est déjà bien assez ».

Wadiaa FERZLY est une jeune metteure en scène syrienne, animatrice d’ateliers d’écriture, elle a écrit une poignée de pièces. « Gangrène » est une plongée au cœur d’une Syrie dévastée, mais attention, ici pas de larmes ni d’apitoiements, la lucidité est de mise. Chaque personnage peut être vu comme l’image d’un pan de la population syrienne. Alors que le peuple semble vouloir s’occidentaliser, le pays est en plein chaos. Pièce courte qui jette un regard très original sur une situation alarmante. Elle vient tout juste de sortir aux éditions l’Espace d’un Instant, elle est traduite de l’arabe par Marguerite GAVILLET MATAR.

http://www.sildav.org/editions-lespace-dun-instant/presentation

(Warren Bismuth)

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