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samedi 15 août 2020

Jacques JOSSE « J’ai pas mal d’écume dans le cigare »

 

Livre de moins de 20 pages en hommage à Alain JÉGOU, poète breton et ami de Jacques JOSSE, décédé le 6 mai 2013. C’est sous le coup de l’émotion que JOSSE entreprend ce récit de souvenirs le même mois, souvenirs parfois diffus – leur première entrevue arrosée dans un bar -, parfois précis – chez Alain, avec la femme de ce dernier. Les goûts en commun, les artistes artisans, qu’ils soient poètes, romanciers ou chanteurs, viendront parachever cette amitié de plusieurs décennies.

Cette Bretagne, Alain et Jacques la connaissent bien et l’adorent, pourtant ce n’est pas « leur » Bretagne : « … Prendre nos distances vis-à-vis d’une Bretagne où nous vivions à l’étroit, et qui avait certes le vent en poupe, mais où certains (il [Alain JÉGOU nddlr] les appelait « les bardes barbants ») semblaient sacraliser à outrance un passé vieux (ah duché, duchesse !) qu’ils voulaient plus ou moins réinventer, réajustant pour l’occasion des idées de fermeture dans les têtes et de checkpoint dans le bocage en oubliant les grandes turpitudes, folies, dictatures et luttes d’un présent qui dépassaient largement les contours de la petite péninsule ».

Cette amitié s’est aussi forgée par correspondance, les deux hommes échangeaient beaucoup par lettre. JOSSE fait ressentir au plus profond toute son émotion, la perte de cet ami proche, de ce poète tant vénéré. Son écriture reste égale à elle-même malgré la détresse : prodigieuse de précision et de suavité, délectable et lumineuse. Ces quelques pages sont une leçon d’humilité, d’amitié et de maniement à la perfection de la langue française.

Ironie de l’histoire : alors que j’extrayais ce bouquin de ma besace au retour d’une marche silencieuse au bord d’un magnifique étang au bord duquel j’avais grignoté un pique-nique frugal mais réconfortant, je constatai à mon grand désarroi que la couverture avait été entachée de graisse émanant de ce satané fromage breton d’une certaine « Madame » dont je préfère ici taire le nom. Quatre taches, l’une à gauche du dessin de couverture, les trois autres à droite (aucune sur le dessin), toutes trois parfaitement alignées verticalement (celle de gauche se trouvait un peu plus bas sur la couverture souillée). La plus haute des trois représente le sigle « infini » (vous savez, ce 8 horizontal), les deux autres, ainsi que celle de gauche nettes, rondes, comme trois têtes. Dans mon esprit du moment, j’y ai vu à droite les visages de JOSSE et de JÉGOU, tout en haut le sigle représentant l’éternité de leur amitié, et à droite un rond sur lequel placer le visage de la personne en train de lire le présent récit. Et ne me dites pas que Dieu y est pour quelque chose, diable !

Bouquin sorti en 2014 chez La Digitale, un vibrant hommage à un proche disparu et quelques pages précieuses.

http://www.editionsladigitale.com/

(Warren Bismuth)

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