Plusieurs
romans graphiques rendent hommage à l’œuvre de Albert CAMUS ou à son parcours.
L’illustrateur Jacques FERRANDEZ, né à Alger, à lui seul, a commis pas moins de
trois BD, adaptations d’une nouvelle et deux romans de CAMUS.
« L’hôte »
est une nouvelle originellement présente dans le recueil « L’exil et le
royaume » de CAMUS. FERRANDEZ lui redonne vie en 2009 dans une BD sobre et
émouvante. Un instituteur français se voit confier un algérien potentiellement
dangereux, combattant contre l’Etat colonisateur. Il doit le mener à une ville
afin de le placer sous l’autorité des forces françaises. L’atmosphère se tend,
l’instituteur se prenant d’affection pour le rebelle, cet hôte réalisant que
son geste pourrait être fatal à l’algérien. FERRANDEZ croque magnifiquement ces
moments par des dessins réalistes, ensoleillés, précis. Des fresques paysagères
viennent décorer une partie du haut de certaines pages dans un décor aride pouvant
faire penser à ceux décrits par GIONO du fond de sa Provence.
Le
plus célèbre roman de CAMUS, « L’étranger », est ici ressuscité en
2013, toujours grâce au travail méticuleux de FERRANDEZ. Le personnage de
Meursault y est scruté, à partir du décès de sa mère. Ce roman de retombée
mondiale est illustré respectueusement, en prenant soin de ne pas en déformer
les propos. L’admiration de FERRANDEZ pour son aîné est évidente, palpable. Il
prend le temps pour reproduire cette histoire, n’en perd pas une miette, le
résultat est à la hauteur, couleurs chaleureuses pour les scènes en extérieur,
plus feutré dans les huis clos
« Le
premier homme » de 2017 » est une adaptation du roman inachevé de
CAMUS, celui dont on retrouve les brouillons dans la voiture où l’écrivain a
trouvé la mort en janvier 1960. Là encore des couleurs chaudes pour évoquer la
jeunesse de Jacques Cormery, le double de CAMUS, la silhouette écrasante et
autoritaire de la grand-mère, la complicité affichée avec la mère. La figure de
l’instituteur de CAMUS, celui qui en quelque sorte a influencé le parcours à
venir du jeune Albert, est mise en avant. Roman graphique ambitieux de 180
pages qui colle au mieux avec le texte original.
Enfin, une longue biographie illustrée, parue en 2013 et sobrement intitulée « CAMUS entre justice et mère », est contée par José LENZINI et mise en images par Laurent GNONI. Des dessins soignés, modernes, là encore de couleur chaude, viennent compléter un long texte revenant sur les épisodes marquant du philosophe écrivain, avec en toile de fond l’attribution du Prix Nobel de littérature en 1957 et le célèbre discours de Stockholm. Retour sur la grand-mère autoritaire, la misère dans une enfance algérienne, l’instituteur de la providence, Monsieur GERMAIN, qui vit en CAMUS un élément particulièrement doué de ses élèves. Mais aussi le football, les histoires de cœur (dont celle avec SARTRE), les positions difficiles à tenir durant la guerre d’Algérie, précédant la fin tragique. Biographie ambitieuse faisant revivre le parcours hors du commun d’un des grands écrivains du XXe siècle.
Quatre albums pour mieux connaître l’œuvre et l’homme, qui peuvent se lire comme une série de quatre épisodes. Les fans devraient s’y retrouver.
(Warren Bismuth)
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